Face aux urgences cardiaques sur le lieu de travail, la question de l’équipement en défibrillateurs automatisés externes (DAE) est aujourd’hui au cœur des préoccupations de nombreuses entreprises. Sachant que chaque minute gagnée dans la prise en charge d’un arrêt cardiaque multiplie les chances de survie, la disponibilité rapide d’un DAE peut s’avérer vitale. Pourtant, en 2025, la législation française impose-t-elle réellement aux entreprises d’équiper leurs locaux de ces appareils de secours ? Entre les textes réglementaires, les recommandations professionnelles, et la responsabilité juridique des employeurs, ce dossier détaille les règles, les obligations, et les bonnes pratiques entourant l’usage et la mise à disposition du défibrillateur en entreprise.
Défibrillateur en entreprise : compréhension des obligations légales et responsabilités de l’employeur
Le défibrillateur automatisé externe est un appareil médical portable destiné à analyser le rythme cardiaque d’une personne en arrêt cardiaque et à délivrer un choc électrique si nécessaire pour restaurer l’activité cardiaque. Son importance est capitale, car un arrêt cardiaque soudain peut survenir n’importe où et n’importe quand, notamment en entreprise où la concentration de personnes expose statistiquement à ce risque. En cas d’arrêt cardiaque, il est recommandé d’entamer rapidement un massage cardiaque et de procéder à une défibrillation précoce au moyen d’un DAE. En France, les obligations légales autour de cet équipement restent cependant nuancées.
Selon l’article R4224-14 du Code du travail, les employeurs ont l’obligation de mettre à disposition un matériel de premiers secours adapté aux risques présents dans l’entreprise. Cette définition générale ne désigne pas explicitement le défibrillateur. Ainsi, la loi ne fait pas du DAE un matériel obligatoire dans toutes les entreprises, contrairement aux extincteurs ou aux trousses de premiers secours. En 2025, la présence d’un DAE dépend donc principalement d’une évaluation préalable des risques et des besoins réalisés par l’employeur. L’article R4224-14 du Code du travail invite ainsi à intégrer cet appareil dans le cadre d’une politique globale de sécurité et de santé au travail.
Dans la pratique, plusieurs critères guident la décision d’installer un défibrillateur en entreprise :
- La nature de l’activité et les risques cardio-vasculaires : certaines professions ou activités exposent les salariés à un risque plus élevé d’arrêt cardiaque, comme celles avec un risque d’électrisation (travail sur installations électriques), ou encore les activités physiques intenses.
- La démographie des salariés : un effectif nombreux en âge mature (plus de 50 ans notamment) ou incluant des personnes à risque (antécédents cardiaques) justifie l’installation d’un DAE.
- L’accessibilité aux secours externes : la distance significative à un service d’urgence ou encore l’accessibilité difficile au site sont des facteurs clés qui encouragent la mise à disposition d’un défibrillateur.
Par ailleurs, si l’entreprise choisit d’équiper ses locaux d’un DAE, l’employeur doit en assurer l’entretien régulier, la bonne visibilité, et définir les modalités d’utilisation pour garantir un secours efficace, conformément aux recommandations énoncées dans le guide INRS sur la mise à disposition des DAE en entreprise.

L’obligation d’installer un défibrillateur dans certains établissements recevant du public (ERP) : implications pour les entreprises
Alors que l’obligation d’équiper les entreprises en DAE reste conditionnelle, les textes réglementaires depuis 2018 ont rendu obligatoire la présence de défibrillateurs automatisés externes dans tous les établissements recevant du public (ERP) de catégories 1 à 4. Cette mesure est issue de l’article R123-57 et suivants du Code de la construction et de l’habitation et précise les lieux où il est impératif de disposer de ce matériel salvateur.
Le classement des ERP selon leur capacité d’accueil détermine ainsi la date d’obligation :
- Depuis le 1er janvier 2020, les ERP de catégorie 1 à 3 (capacité > 300 personnes) doivent installer un DAE.
- Depuis le 1er janvier 2021, cette obligation s’est étendue aux ERP de catégorie 4.
- À partir du 1er janvier 2022, certains ERP de catégorie 5 et « à risque » – tels que les structures d’accueil pour personnes âgées, handicapées ou les établissements de soins, ainsi que les salles polyvalentes sportives – sont également concernés.
Cette évolution législative vise à optimiser la sécurité dans les lieux publics où la probabilité d’un incident cardiaque est accrue par la densité de personnes présentes. Par exemple, un gymnase d’entreprise recevant ponctuellement du public ou une salle de réunion de grande capacité pourrait entrer dans ces catégories. L’entreprise doit alors être attentive à son classement d’ERP pour s’assurer du respect de la réglementation.
Les ERP ne respectant pas ces obligations s’exposent à des sanctions pouvant aller jusqu’à la fermeture administrative et des amendes sévères, conformément à la réglementation en vigueur. La responsabilité juridique peut aussi être engagée en cas de décès dû à un arrêt cardiaque non pris en charge convenablement faute d’équipement adéquat.
Les bonnes pratiques d’installation, signalisation et maintenance du DAE en entreprise
L’efficacité du défibrillateur dépend fortement de son emplacement, de sa disponibilité, et de son bon fonctionnement. La loi encadre ces points afin d’assurer une réponse rapide en cas d’urgence. Le Code de la construction et le Code du travail stipulent que l’appareil doit être visible, accessible, et signalé clairement.
Pour vous aider ainsi que vos équipes à l’utilisation du DAE, nous avons rédigé un guide sur le fonctionnement et la bonne utilisation du DAE.
Choisir un emplacement stratégique pour le DAE dans l’entreprise
Le choix du lieu d’implantation est crucial. Il doit permettre une intervention rapide dans les zones à forte affluence ou à risque majeur (accès à un atelier électrique, vestiaires, salle de pause, hall d’entrée). Une analyse des flux et des zones fréquentées aide à déterminer ce site stratégique.
Deux options sont possibles :
- Installation en libre accès : le DAE est placé dans un boîtier situé dans un lieu accessible à tous, avec un accès facilité en permanence.
- Installation dans un local identifié : il est rangé avec le matériel de secours, mais cette option nécessite une signalisation claire et la sensibilisation des salariés quant à son emplacement.
Signaler la présence du DAE à l’aide d’une signalétique réglementaire
Un défibrillateur non signalé ou insuffisamment indiqué perd son utilité. Le Code du travail impose une signalisation conforme à la norme EN ISO 7010 : un pictogramme blanc sur fond vert. Un arrêté du 29 octobre 2019 a défini six panneaux types destinés à :
- annoncer la présence du DAE,
- indiquer son emplacement,
- orienter vers son accès,
- fournir des informations de maintenance.
Ces panneaux doivent être visibles dans toute l’entreprise et placés de manière à guider rapidement les potentiels secouristes.
Assurer une maintenance adaptée et périodique du défibrillateur
Le défibrillateur est un dispositif médical de classe III. Ainsi, la réglementation impose une maintenance régulière et rigoureuse pour garantir son fonctionnement optimal. L’employeur doit :
- vérifier périodiquement la batterie et les électrodes,
- programmer des contrôles effectués selon les recommandations du fabricant,
- prévoir un contrat de maintenance si besoin,
- élaborer un registre de suivi où seront notées les vérifications.
Cette maintenance peut être assurée soit directement par le fabricant, un prestataire spécialisé, ou au sein même de l’entreprise si les compétences sont disponibles. Qualité et disponibilité du matériel sont des impératifs absolus en situation d’urgence.
La formation à l’utilisation du défibrillateur en entreprise : obligation et bonnes pratiques
Depuis un décret de 2007, toute personne présente dans un lieu public ou privé peut utiliser un DAE sans formation préalable spécifique. Cependant, cette liberté ne doit pas induire un manque de préparation. L’utilisation du DAE réclame, pour être pleinement efficace, la maîtrise d’une chaîne de secours complète incluant l’appel des secours, le massage cardiaque, puis l’utilisation appropriée de l’appareil.
Le Code du travail recommande à l’employeur d’organiser des formations adaptées pour que les salariés soient capables d’intervenir dans ces situations. Parmi les formations reconnues figurent :
- La formation SST (Sauveteur Secouriste du Travail), qui comprend une initiation à la réanimation cardio-pulmonaire et à l’utilisation des DAE,
- Le PSC1 (Prévention et secours civiques de niveau 1), accessible à tous,
- Des sessions ponctuelles de sensibilisation et d’entrainement pratiques au maniement du DAE.
Il est essentiel que la formation soit mise à jour régulièrement pour conserver les réflexes et intégrer les évolutions technologiques ou réglementaires. Une démarche proactive améliore la réactivité collective, un facteur clé dans la survie des victimes d’arrêt cardiaque.
Pour approfondir ce sujet, il est possible de consulter le guide fourni par l’INRS sur la formation et la mise à disposition des défibrillateurs en entreprise.
Les enjeux de la déclaration et de la sensibilisation autour des DAE en entreprise
De plus en plus d’entreprises optent pour la mise à disposition volontaire d’un DAE, même sans obligation légale. Cette initiative citoyenne s’accompagne d’une obligation de déclaration. En effet, les exploitants de DAE doivent fournir des informations détaillées sur leur implantation dans une base de données nationale, afin de faciliter la localisation rapide par les services d’urgence.
L’accès à cette base permet d’informer le grand public et les secours sur l’emplacement exact des dispositifs en libre accès. Une telle transpa rence est un levier fondamental pour optimiser le maillage territorial des équipements et l’efficacité des interventions en cas de situation critique.
Pour assurer une prévention efficace, plusieurs recommandations sont à suivre :
- Associer à la mise en place du défibrillateur une communication vers l’ensemble du personnel,
- Organiser des exercices réguliers pour familiariser les salariés à l’appareil,
- Utiliser une signalisation conforme et bien visible,
- Assurer une veille sur la réglementation et une mise à jour des procédures internes.
FAQ – Défibrillateur en entreprise et obligations légales
- Le défibrillateur est-il obligatoire dans toutes les entreprises ?
Non, seulement celles qui reçoivent du public en catégories 1 à 5 ou celles pour lesquelles l’évaluation des risques l’impose. La loi encourage vivement son usage partout où c’est utile. - Faut-il obligatoirement former les salariés à son utilisation ?
La loi n’oblige pas à une formation spécifique, mais elle est fortement recommandée pour assurer une réactivité efficace et éviter l’erreur lors d’une intervention. - Qui peut utiliser un défibrillateur automatisé externe ?
Depuis 2007, toute personne, même non médecin, est autorisée à utiliser un DAE dans un contexte d’urgence. - Comment entretenir le défibrillateur ?
Un entretien périodique est indispensable. L’employeur doit effectuer ou faire réaliser des contrôles réguliers, suivant les préconisations du fabricant. - Que risquent les établissements recevant du public en cas de non-respect des obligations ?
Des sanctions administratives, jusqu’à la fermeture, des amendes lourdes, voire des poursuites pénales peuvent être engagées.
Ces réponses synthétisent les règles et bonnes pratiques incontournables à maîtriser pour une entreprise responsable et engagée dans la protection de ses salariés.